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L'abomination de la désolation (partie 2)


Jérusalem investie par des camps militaires


Dans son discours sur la fin des temps, Jésus fait mention de la prophétie de Daniel à la fois pour confirmer son premier accomplissement mais aussi pour annoncer les futures réalisations. Il serait trop long de rentrer dans les détails des différents discours sur la fin, des trois évangiles, mais on ne peut ne pas mentionner les quelques différences entre les trois écrits. Si Matthieu et Marc font mention d’une abomination là où elle ne doit pas être (le lieu Saint), l’évangéliste Luc parle, quant à lui, de la ville de Jérusalem investie par des armées. Cette prophétie fut réalisée en l’an 70 lors de la prise de Jérusalem par les légions romaines de Titus.


Depuis la conquête de la Judée, par le général Pompée en 63 av J-C, le peuple juif est sous la pénible tutelle des Romains. Pompée lui-même a souillé le Temple, entrant dans le Saint des saints, pendant que ses hommes égorgent les prêtres du Temple. La Judée possède alors une certaine indépendance dans l’empire romain.


Les rois juifs hasmonéens sont placés sur le trône du royaume mais gouvernent de manière fantoche, le pouvoir étant réellement aux mains des Romains. Les Hasmonéens sont les descendants de la famille Maccabée, qui avait lutté pour protéger le judaïsme de l’hellénisation.


Un siècle plus tard, ces descendants des Maccabées sont désormais hellénisants, symboles de la décadence de l’aristocratie juive. Le peuple, lui, haït ces nobles qui foulent aux pieds leurs valeurs et leur religion, tel Hérode Antipas (fils d’Hérode le Grand, le bourreau de Bethléem) qui finit par mettre à mort Jean Baptiste, car ce dernier lui reproche son union avec la femme de son frère.


Le peuple juif se divise à cette période en plusieurs branches. Les sadducéens, membres du clergé et de l’aristocratie s’opposent ainsi aux pharisiens, plus modestes et attachés à des chefs religieux plus locaux (dont le rabbi Yeshoua/ Jésus). Les ésseniens, quant à eux, vivent retirés du monde, en communauté et dans le dépouillement le plus total. Enfin, le dernier grand courant juif de l’époque est celui des zélotes, farouchement opposés aux Romains et extrêmement violents envers l’occupant et ses collaborateurs juifs.


Voici le contexte dans lequel évoluaient Jésus et ses disciples, contexte de soumission humiliante aux romains mais aussi de ferveur spirituelle.


Le prophète Daniel n’avait-il pas annoncé l’apparition d’un Messie à cette période ?


Selon le prophète Daniel (9 v 20-26), le Messie se révélerait environ dans 490 ans, ce qui correspond à la naissance de Jésus. Cette prophétie était bien connue dans tous les milieux juifs de l’époque, si bien que l’effervescence messianisante était très forte et crainte des romains. Le joug romain était devenu insupportable.


En l’an 66 de notre ère, comme ils ne voyaient pas le Messie les délivrer (où plutôt en l’ignorant lors de sa venue, Jésus étant mort depuis plus de 30 ans ), les zélotes cherchent désormais à « forcer » le Messie à revenir. La révolte éclate. Une part assez importante du peuple s’y rattache. Les révoltés ne se font pas d’illusion sur une possible victoire humaine, l’armée romaine étant la plus moderne de l’époque et bien supérieure en nombre, mais le chaos provoqué à Jérusalem « forcera » Dieu à intervenir pour délivrer son peuple et sa ville Sainte selon eux.


Les révoltés s’emparent des régions de la Galilée et de la Judée, dont Jérusalem qui devient le centre de la révolte.


Grâce à l’historien juif Flavius Josèphe, général juif qui participe contre son gré à la révolte, l’histoire de la révolte nous est parvenue et constitue une source historique des plus précieuses pour cerner cette épopée. L’empire romain réagit et le général Vespasien reprend les régions de Galilée et de la Samarie. Reste Jérusalem dont s’approchent les légions romaines. Vespasien met le siège devant la ville mais n’attaque pas.


En effet, un drame joue en sa faveur : les juifs sont totalement divisés et se livrent, au cœur même de la ville Sainte, un combat mortel. Les zélotes traquent tous les aristocrates hasmonéens et prennent le contrôle du Temple au détriment des saducéens. Les révoltés font appel à des renforts qui viennent d’Idumée, une région convertie de force au judaïsme mais hostile aux judéens. Vingt mille iduméens entrent dans Jérusalem pour la défendre, mais une fois à l’intérieur, les iduméens se livrent au meurtre et au pillage de la ville pendant plus de trois jours. Les rues ruissellent de sang innocent, principalement des civils n’étant aucunement concernés par cette lutte fratricide. Les iduméens quittent la ville aussi vite qu’ils sont arrivés, après l’avoir mise à feu et à sang. Un compromis est finalement trouvé entre les différentes factions : chacun défendra une partie de Jérusalem.


Désormais pharisiens, sadducéens, zélotes, sicaires (semblables aux zélotes) et quelques iduméens sont unis dans la révolte, dont l’issue est désormais irréversible : aucune clémence ne sera accordée par les romains pour qui l’affront de la révolte est insupportable.


Les romains, justement, sont en plein désarroi : l’empereur Néron vient de se suicider (68 ap J-C), provoquant une période de trouble liée à sa succession. En effet, cet homme cruel avait lui-même assassiné sa femme enceinte dans un excès de rage, se privant d’une descendance. Cette année 68 restera dans la postérité comme l’année « des quatre empereurs ». Quatre généraux se proclament tour à tour empereurs et s’affrontent. Le général Vespasien sort vainqueur de cette lutte et devient finalement le nouvel empereur de l’empire romain.



Cette guerre de succession permet aux insurgés juifs de bénéficier d’un peu de répit avant que les troupes romaines ne marchent sur Jérusalem.


Jésus avait mis en garde ses disciples, afin qu’ils soient conscients des évènements : « Lorsque vous verrez Jérusalem investie par des armées, sachez alors que sa désolation est proche. Alors que ceux qui seront en Judée fuient dans les montagnes, que ceux qui seront au milieu de Jérusalem s’en retirent, et que ceux qui seront dans les campagnes n’entrent pas dans la ville. Car ce seront des jours de vengeance, pour l’accomplissement de tout ce qui est écrit. » (Luc 21 v 20-22).


Lorsque Vespasien s’est retiré avec ses troupes de Jérusalem, une grande partie de la communauté chrétienne s’est souvenue de cette parole de Jésus. Alors que certains habitants pensaient que les romains ne reviendraient pas de sitôt, occupés à se faire la guerre entre eux, ces chrétiens se sont enfuis de la ville comme le leur avait conseillé rabbi Yeshoua.

En mars 70, le général romain Titus, fils du nouvel empereur Vespasien, assiège Jérusalem avec quatre légions. Au terme de combats sanguinaires, d’exactions sur les populations fuyant la ville et de pillages, la ville Sainte tombe entre les mains des romains. Comme un symbole, le Temple est le dernier bastion des défenseurs juifs.


Pourtant, il est incendié lors de l’assaut final. Horreur suprême, les légions romaines sont composées principalement de Syriens et de Gaulois, dont les étendards ont pour emblèmes des animaux impurs, considérés par ces peuples comme des divinités. Le pire de tous est celui des Gaulois : l’image d’un sanglier souille le lieu Saint de tout un peuple.



La révolte est définitivement écrasée quelques temps plus tard, le peuple juif grandement dépouillé, le judaïsme désemparé (seul le courant des pharisiens subsistera après cette épreuve). Selon Flavius Josèphe, près de 100 000 juifs sont emmenés en captivité tandis qu’environ 1,1 million de juifs ont perdu la vie dans cet assaut. En effet, l’assaut eut lieu durant la période de Pâque durant laquelle la population de Jérusalem triplait avec la venue de Juifs du monde entier. Le Temple n’est plus. Le temps des nations prophétisé par Jésus ne fait que commencer : « Ils seront emmenés captifs parmi toutes les nations et Jérusalem sera foulée aux pieds par les nations, jusqu’à ce que les temps des nations soient accomplis » (Luc 21 v 24).

Les objets du temple emportés à Rome, arc de triomphe de Titus



L’Islam : le dôme du rocher


La troisième réalisation de la prophétie de Daniel nous est bien plus proche et même actuelle, pour ainsi dire. Selon les Sages d’Israël, l’empire romain est ce quatrième empire dont a parlé le prophète Daniel, composé d’une multitude de nations différentes. L’empire romain était très hétérogène ethniquement et culturellement, chaque peuple conquis adoptait la culture romaine tout en enrichissant cette culture romaine, faite de plus en plus d’un agrégat de cultures.

Pourtant, l’empire romain finit par rapidement ne plus s’étendre que sur la côte nord de la Méditerranée. Les sages d’Israël expliquent qu’au fil des siècles, l’empire romain s’est transformé et est désormais composé de deux entités différentes : la civilisation européenne/occidentale et la civilisation arabe.


En l’an 691, après que les Arabes aient conquis la Palestine, aux mains des byzantins à partir de 636, le dôme du rocher est achevé à l’emplacement exact de l’ancien Saint des Saints. Les explications sur la construction de cet édifice ne sont pas claires. Une hypothèse émise par l’historien Edouard-Marie Gallez serait que les premiers musulmans s’étaient alliés à une secte judéo-chrétienne (les judéo-nazaréens) qui souhaitait reconstruire au plus vite le Temple pour que le Messie revienne. Avec l’aide de leurs alliés musulmans, la construction de l’édifice fut assez rapide.


Pourtant, lorsque la construction fut terminée, aucun Messie ne se manifesta... Par la suite, les musulmans combattront les judéo-nazaréens qui les avaient trompés.


La construction d’un tel édifice peut-elle être considérée comme une « abomination de la désolation » ?

On serait tentés de répondre par l’affirmative. En effet, n’est-il pas marqué sur la façade du dôme :


« O peuple du Livre (les Chrétiens) ! N’exagérez pas votre religion ! Issa (Jésus) fils de Marie, n’était qu’un messager d’Allah, Le Christ Jésus, fils de Marie, n’est jamais qu’un messager d’Allah, Sa Parole qu’Il jeta vers Marie, un Esprit de Sa part. Croyez donc en Allah et en ses messagers. Et ne dites pas « Trois ». Cessez ! Ce sera meilleur pour vous. Allah est un seul Dieu. Rien d’autre. Il aurait un enfant ? Pureté à Lui ! » (Sourate 4 v 171) ou encore « Allah est trop glorieux pour avoir un fils (…) il n’y a pas d’autre Dieu qu’Allah et Muhamad est son prophète ».


Il est intéressant de constater que les évangiles synoptiques montrent des légères différences au niveau du discours sur la fin et que l’évangile de Marc fait mention de « l’abomination de la désolation établie là où elle ne doit pas être ». Il n’est pas question ici que le Temple soit encore présent, ce qui confirme l’hypothèse d’une nouvelle « abomination de la désolation » depuis la construction du dôme du rocher.



Ainsi, « l’abomination de la désolation » est une réalité historique qui a déjà été réalisée à trois reprises. Cela n’empêche en rien une réalisation future, par ailleurs. Cependant, il s’agissait ici de revenir sur les périodes de l’Histoire où cet événement s’est déjà produit et nul ne sait de quoi sera fait demain. Une chose est sûre.


Jésus adresse une parole d’encouragement à ses disciples, après avoir annoncé cette « abomination de la désolation », en leur disant : « Quand cela commencera d’arriver, redressez-vous et levez la tête, parce que votre délivrance approche » (Luc 21 v 28). Redressons donc nos têtes et réjouissons-nous, notre Sauveur arrive !


Vous pouvez également lire dans nos archives Hashomer un article de Jean-Marc Thobois complémentaire sur le discours sur les temps de la fin dans les trois évangiles synoptiques (Hashomer n°11).



Dôme du rocher

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