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Existe-t-il des cycles prophétiques ?

Dernière mise à jour : 25 avr. 2023

Article paru en 1999 dans le Keren n°43


Les prophéties bibliques se répètent-elles ? Autrement dit, les nombreuses prophéties de l'Ancien Testament relatives au retour des juifs dans leur pays concernent-elles notre temps ou se sont-elles accomplies lors du retour de Babylone en 538, de sorte que l'on n'ait plus rien à en attendre ?


Il faut d'abord noter que les chrétiens, surtout protestants, bien avant Théodore Herzl, ont annoncé le retour des juifs dans leur pays, en se basant souvent sur de telles prophéties.

C'est un théologien tchèque qui, au début du siècle dernier, a mis en évidence dans la Bible ce qu'il a appelé des «cycles prophétiques», c'est-à-dire des événements qui se répètent dans l'histoire du peuple élu, parce qu'ils se basent sur des principes prophétiques immuables et constants. Il remarqua l'existence d'un cycle dispersion-retour.


Ce cycle apparaît pour la première fois en Genèse 15, lors de l'alliance entre les animaux partagés, où nous lisons : "Sache que tes descendants seront captifs pendant 400 ans dans un pays quine sera pas le leur... puis à la quatrième génération, ils reviendront dans ce pays-ci avec de grandes richesses, parce que l'iniquité des Amoréens n 'est pas arrivée son comble !»

Il est tout à fait évident, en lisant le livre de la Genèse, que la vocation d'Israël d'être le véhicule de la révélation de Dieu et de son salut pour le monde entier, est liée la promesse de la terre d'Israël.

Cette promesse scellée par l'alliance entre les animaux partagés de Genèse 15 est maintes fois rappelée dans le livre qui le fit considérer comme prophétique par les sages d'Israël. Ce qui arriva aux pères, ont-ils dit, est un exemple prophétique de ce qui arrivera aux fils, comme en témoigne le reste de l'histoire biblique. La descente en Egypte, l'oppression, l'exode et la conquête ont déjà été vécus symboliquement par les patriarches....


« Va-t'en de ton pays, dit Dieu à Abraham... vers le pays que je te montrerai", "tout ce pays, je le donnerai à toi et à tes descendants pour toujours!» (Genèse 13 v 15, 15 v 7, 17 v 8).




DES PROPHÉTIES INTEMPORELLES


Ce serment est répété à Isaac (Genèse26 v3) et à Jacob (Genèse 28 v 13, 35 v 12, 48 v 4, 50 v 24). Or, de même que les nations ont contesté l'élection d'Israël, elles n'ont cessé de contester le don de la terre que Dieu a fait à son peuple ; c'est fondamentalement la même démarche.


Le cycle dispersion-retour est aussi évoqué en Lévitique 26 v 41: «Moi aussi, je leur résisterai et les mènerai dans le pays de leurs ennemis. Alors leur cœur incirconcis s 'humiliera.. Je me souviendrai de mon alliance avec Abraham, Isaac et Jacob et je me souviendrai du pays...».

Il reparaît aussi dans Deutéronome 30 v 4 : «Quand tu seras banni aux extrémités de la terre, l'Eternel ton Dieu te rassemblera et te fera revenir dans le pays qu'ont possédé tes pères. »


Le livre des Psaumes est lui aussi rempli d'allusions à ce cycle, comme par exemple les Psaumes 14 v 7, 53 v 7 qui sont des refrains liturgiques chantés dans le temple ; les Psaumes 80 v20, 102 v 14-23, 106v47, 107v2-3, 132 v 13-18. Jérémie le cite aussi en 31 v23-25.


Tous ces textes font explicitement référence à l'alliance éternelle conclue avec les pères de la nation. Elles sont intemporelles. C'est en prenant appui sur ces promesses que les prophètes annoncent que Dieu ramènera le peuple de l'exil de Babylone, mais aussi de tout autre exil qui pourrait arriver par la suite. C'est aussi en se basant sur ces promesses faites aux pères que Jésus peut annoncer le retour du peuple d'Israël dispersé par les Romains après la ruine de Jérusalem en 70.


Le message de la Bible est clair : tout débordement du péché du peuple entrainera un exil loin de sa terre, mais quelle que soit la sévérité de cet exil, Dieu y mettra fin tôt ou tard, car la terre d'Israël a été donnée en possession éternelle aux fils d'Abraham, Isaac et Jacob.



On le voit, les prophéties de la Thora n'ont rien à voir avec l'exil de Babylone, ni d'ailleurs avec aucun exil historiquement situé. Il s'agit de principes généraux qui se reproduiront chaque fois que les circonstances qu'elles décrivent se produiront... Elles soulignent aussi la précarité de l'existence d'Israël dans sa terre.

On retrouve aussi ce cycle chez des prophètes qui vivaient bien avant l'exil de Babylone, tels Amos ou Osée et qui ont annoncé un exil et un retour sans en situer l'endroit géographiquement.



LE NOUVEAU TESTAMENT SE RÉFÈRE AUX PROPHÉTIES DE L'ANCIEN


S'il est vrai que les grands prophètes classiques situent leurs prophéties par rapport à Babylone, comme nous l'avons montré plus haut, le cycle dispersion-retour est omniprésent chez eux. En tout temps, il est possible de dire que, lorsque le peuple juif est dispersé, on peut s'attendre à ce qu'un jour il soit rassemblé dans son pays car ce cycle peut et doit se répéter. Dès lors, même les prophètes contemporains de la grandeur babylonienne prophétisent deux niveaux, comme l'avaient fort bien compris les juifs de l'époque du deuxième temple pour lesquels tous les prophètes ont prophétisé pour les jours du Messie.


Ils estimaient que les prophéties ne s'étaient réalisées que partiellement lors du retour de Babylone, puisque de leur temps encore, la plus grande partie du peuple vivait en diaspora (cf Actes 2). De leur temps déjà, alors même que le temple existait, ils attendaient le rassemblement des exilés d'Israël.


Ainsi Jean-Baptiste et non plus le prophète Esaïe, est la voix qui crie dans le désert : "Préparez les chemins du Seigneur». A Nazareth, Jésus cite Esaïe 61 et déclare : "Aujourd'hui cette parole que vous venez d'entendre s'est accomplie» et non plus lors de l'Edit de Cyrus permettant le retour des exilés de Babylone comme le veut le contexte strict de la prophétie d'Esaïe. Ainsi, la bonne nouvelle du retour de Babylone devient la bonne nouvelle de ['Evangile, etc..


Bref, le texte prophétique, comme tout le texte biblique, n'est pas figé. Jésus déclare que ce qui arriva du temps de Noé arrivera de nouveau au jour du Fils de l'homme. Dans le récit du déluge comme dans celui de Sodome, Jésus discerne un cycle prophétique.


Lors de la Pentecôte, les Apôtres citent Joël 3 v 1-5 pour l'appliquer ce qui vient de se produire. Jésus cite l'abomination et la désolation dont a parlé le prophète Daniel comme étant encore à venir par rapport son temps, alors que, stricto sensu, cette prophétie de Daniel a déjà trouvé un accomplissement lors de la profanation du temple par Antiochus Epiphane en 165 avant Jésus-Christ. D'ailleurs, si les événements du chapitre II de Daniel ont des parallèles historiques indiscutables avec cette période des Maccabées, le chapitre 12 ne s'est pas accompli alors. Il y a donc des temps plus ou moins longs qui peuvent séparer deux versets qui se suivent.



LE RETOUR ET L'ÉLECTION


Faut-il s'étonner de voir de notre temps Israël revenir dans son pays après deux mile ans d'exil ? Ce retour est cohérent avec l'esprit et la lettre du texte biblique. Il est donc plus que probable que ce retour est un pas en avant vers le retour du Messie. Certes, il convient de se gardera lors d'une eschatologie trop concrète, ce qui était d'ailleurs la pensée de Jésus, comme celles des sages d'Israël. Jésus n'a pas voulu révéler des choses trop claires sur son retour.



Les prophètes classiques prophétisaient-ils aussi pour notre temps ?


Les prophètes classiques prophétisèrent-ils uniquement pour leur temps ? Indépendamment des cycles prophétiques, les choses apparaissent plus complexes que ce qu'affirment les critiques, pour lesquels la perspective de ces prophéties ne dépasse pas le retour de l'exil de Babylone.


Il faut d'abord noter que la résurrection d'Israël est pour un chrétien authentique la résurrection de ses racines spirituelles qui sont à Jérusalem, qu'on le veuille ou non. La résurrection de la langue hébraïque a aussi une grande importance. De nombreuses difficultés théologiques viennent aussi du fait qu'on lit la Bible dans des traductions, ce qui bloque le texte biblique et l'enferme dans de faux problèmes. Le texte biblique est un texte vivant et non figé ; aussi convient-il de nous demander comment Jésus et les Apôtres ont compris ces textes.



Il est clair qu'ils ne considéraient pas les prophéties comme définitivement accomplies. Peut-on penser que Dieu ait tout prévu d'Israël de notre temps ? Si on croit que Dieu du monde, on est alors en droit de penser dans son pays de notre temps n'est d'arbitraire. En outre, les relations d'Israël avec sa terre sont soulignées dans la Bible, en sorte que le retour d'Israël cette terre est en accord avec le message biblique.


Enfin, la Bible affirme nettement que ce retour aura avec l'avènement du Messie. Certes, on peut craindre qu'une telle perspective puisse conduire certains dans un enthousiasme excessif. incontestablement une interprétation millénariste à Jésus lui-même s'est opposé.


Le problème vient aussi de ce qu'aujourd'hui, dans bien des milieux chrétiens, on ne pense plus à partir des données bibliques. On veut un christianisme qui n'est plus chrétien et un judaïsme qui n'est plus juif. Les chrétiens ne s'intéressent plus à leurs racines et le christianisme devient semblable au paganisme décadent, quand les temples se vidaient.




Tout dans les prophéties de l'Ancien Testament n'a pas encore été accompli


Mais pour la Bible, Ancien et Nouveau Testaments, l'existence normale du peuple juif est dans un état situé sur la terre d'Israël. L'exil est toujours un châtiment. Dans l'exil, selon Ezéchiel, les juifs sont malédiction pour les nations. Dans leur terre, ils sont bénédiction.


Le sionisme a voulu résoudre la question juive en lui rendant sa patrie. En cela, il répondait à la vision biblique. Son erreur a été et reste d'oublier que jusqu'à la parousie, la situation des juifs continue à être marquée par des événements tragiques. Il est donc clair que, même si on s'en tient seulement aux prophéties de l'Ancien Testament, tout ne se trouve pas accompli.


Esaïe 1 v 12 déclare que Dieu rassemblera les exilés et les dispersés de Juda des quatre extrémités de la terre. Cette prophétie ne s'est réalisée que partiellement lors du retour de Babylone. D'ailleurs, seuls sont revenus les exilés de Juda, les autres constituant les «dix tribus perdues» sur lesquelles nous nous sommes penchés dans un précédent numéro.


Même les exilés de Juda ne sont pas revenus des quatre extrémités de la terre, mais essentiellement de Babylone (cf Psaume 107 v 3-4). Ce texte est d'ailleurs cité dans la prière quotidienne qu'on adresse à Dieu en faveur du retour en Sion (voir aussi Esaie 34 v 16-17).Esaïe 43 v 5-6 lui aussi, comme d'ailleurs le Psaume 147, évoque ce rassemblement des quatre points de l'horizon, des extrémités de la terre». Les rabbins ont conclu de ces prophéties que la rédemption ne saurait avoir lieu avant qu'il y ait eu des dans tous les pays du monde, ce qui fut le cas à partir du XVIème siècle de notre ère. Cette idée se retrouve aussi en Esaïe 49 v 12.


Il faut donc admettre que ou bien il y a chez les prophètes aune tendance orientale à l'exagération» comme le prétendent certains, ou bien les prophéties évoquent un retour encore plus lointain. Or, le retour actuel ressemble plus à celui qu'évoquent les prophéties qu'au premier retour de Babylone.



Les grands prophètes voyaient plus loin que le retour de Babylone


Esaïe notamment, Iie le retour d'Israël dans son pays à la du monde entier qui, dès lors, retrouvera les conditions de l'Eden (Esaïe 11). Après le retour de l'exil de Babylone, inutile de dire que ce fut loin d'être le cas ! C'est donc réduire singulièrement la perspective des prophètes que de la limiter au retour de l'exil de Babylone. D'ailleurs, la première partie du livre d'Esaïe a plutôt affaire au danger assyrien qu'au danger babylonien, l'Assyrie devenant un symbole des ennemis eschatologiques d'Israël. Mais la vision d'Esaïe va bien au-delà d'un simple retour temporel. Pour lui, Jérusalem, la petite capitale de la Judée, est appelée à devenir la métropole spirituelle du monde entier (Esaïe 2), ce qui, bien entendu, n'eut pas lieu lors du retour de Babylone (cf Osée 11 v 11, Psaume 72).


Le retour eschatologique d'Israël est lié à l'avènement du Messie et à la résurrection physique des morts (Esaïe 26 v 19). Les royaumes corrompus des nations seront détruits (Es 3435). Quand ces événements ont-ils eu lieu lors du retour de Babylone ?


Toujours pour Esaïe, la foi au Dieu d'Israël s'étendra dans le monde entier, la nature elle-même sera transformée (cf Romains 8), Même si on considère que ces prophéties (partiellement en tout cas) se sont accomplies avec le christianisme, ce ne fut que bien longtemps après le retour de Babylone !


Même Jérémie qui, incontestablement, prophétise dans la perspective de l'exil à Babylone, évoque lui aussi en 3 v 18 le retour des dix tribus du Nord (cf 31 v 8-14 et 17-20). D'ailleurs, pour Jérémie la rédemption est encore à venir (30 v 18, 23 v 8) ; elle sera matérielle, nationale et spirituelle. La tendance au mal qui est dans le cœur de l'homme sera ôtée. II faudra pour cela une nouvelle alliance inscrite dans les cœurs (31 v 31-34).Même le fameux chapitre 37 du prophète Ezéchiel concernant les ossements desséchés, que l'on attribue au retour de l'exil de Babylone, dépasse cette perspective. II doit être lu avec ce qui suit, c'est-à-dire avec la prophétie sur le retour des dix tribus et le rassemblement des deux royaumes dont on sait qu'il n'eut pas lieu après le retour de l'exil de Babylone.


Enfin, les chapitres 38 et 39 concernant la destruction de Gog, incarnation des forces du mal dont la destruction est un préalable à l'établissement du royaume de Dieu sur terre, concernent «des temps éloignés», «les temps de la fin». L'obsession de montrer que toutes les prophéties de l'Ancien Testament n'ont d'autre perspective que le retour de Babylone est telle qu'on a même essayé de montrer que Gog n'est autre que Babylone ! La chute de cette ville en 539 est loin de correspondre aux données de la prophétie. Selon le prophète lui-même, la perspective de ce texte est entièrement eschatologique et doit être comprise comme devant s'accomplir dans une génération très éloignée chronologiquement de celle des premiers destinataires de la prophétie ! (voir aussi Joël 3 v 1-2)



Après l'exil, les prophètes du retour prophétisaient bien évidemment pour notre temps

La deuxième partie des prophéties du livre de Zacharie, à partir du chapitre 9 v 10, a manifestement la même perspective, tout comme certaines prophéties de Daniel qui, dit le prophète, s'appliquent à des «temps lointains». Dieu révèle au prophète que lui-même n'en verra pas l'accomplissement et ne doit pas même s'attendre à les comprendre. Zacharie, pour sa part, prophétisait après le retour de l'exil de Babylone (il évoque aussi d'ailleurs le retour des dix tribus). Malgré cela, le prophète annonce un autre exil et un autre retour. A ce sujet, voici ce qu'écrit une note de la TOB, citant Zacharie 9 v 10 : «Les grandes batailles permettront le regroupement de tous les dispersés du peuple qui reviendront, au point que toutes les frontières traditionnelles éclateront...».



Plus loin la TOB (traduction œcuménique de la Bible) admet que plusieurs passages du livre de Zacharie puissent annoncer que «le Seigneur lui-même présidera le grand rassemblement de tout le peuple». Certes, la TOB ne va pas jusqu'à affirmer que ces textes concernent l'époque moderne et ne veut y voir que des prophéties qui se sont réalisées à l'époque macchabéenne. Mais alors, nous nous demandons quand, à cette époque, les pieds du Messie se sont-ils posés sur le Mont des Oliviers ?

D'ailleurs, selon Actes 1 v 11-12, l'accomplissement de cette prophétie est encore à venir ; c'est à elle que font allusion les anges. D'autres commentateurs affirment que les prophéties de Zacharie se sont accomplies en 70, mais le problème reste le même.

Quoiqu'il en soit, on constate que prétendre que toutes les prophéties de l'Ancien Testament se sont accomplies lors du retour de l'exil, est singulièrement réducteur. Une étude rapide comme celle que nous venons d'effectuer montre que les choses sont plus complexes. Même les adeptes de ce type de lecture reconnaissent que la lecture de l'Ancien Testament, que font les juifs, est légitime «dans leur perspective» mais, disent-ils, elle ne l'est pas dans la perspective du Nouveau Testament.


Faut-il spiritualiser les prophéties pour les appliquer à l'Eglise ?


Selon le psaume 87, Jérusalem est la mère de tous les peuples. Lors du grand retour de la fin, Esaïe 66 nous la montre présente souvent Jérusalem comme une mère consolée au temps de la fin. Ainsi, dans le Nouveau Testament comme dans le judaïsme, il n'y a pas de glissement d'une Jérusalem terrestre vers une Jérusalem céleste, mais la coexistence des deux réalités, qui au temps de la fin, se réuniront quand la Jérusalem céleste descendra du ciel sur la nouvelle terre, comme nous le lisons en Apocalypse 21 et 22.


Un des aspects de l'enseignement du mépris est que le peuple d'Israël, ayant rejeté Jésus, a perdu à tout jamais ses droits sur Jérusalem et la terre sainte. Jérusalem est d'ailleurs spiritualisée et est assimilée à l'Eglise «mère des hommes», «nouvel Israël selon l'Esprit contre Israël selon la chair». Pourtant le problème des lieux saints montre que le christianisme n'a jamais vraiment pu évacuer l'importance de la Jérusalem terrestre. Le rêve d'une domination chrétienne sur la Jérusalem terrestre, qui culmina lors de l'épopée des croisades, demeure jusqu'à nos jours dans la volonté d'internationaliser Jérusalem et les lieux saints, que l'on trouve notamment dans le catholicisme.


Aussi, avant de parler du «déplacement de la promesse de la terre d'Israël», conviendrait-il d'être logique jusqu'au bout. Ou bien il faut affirmer que la Jérusalem terrestre n'a plus aucune importance pour la foi, et alors se désintéresser de la question des lieux saints, ou bien il faut revoir le problème !


La Bible se place dans une toute autre perspective : le salut au dernier jour est à la fois du ciel et de la terre. En Romains 9, Paul décrit «les souffrances de l'enfantement» qui affligent la création toute entière qui, elle-aussi, sera un jour affranchie de la vanité. L'eschatologie du Nouveau Testament, comme l'eschatologie juive, inclut le ciel et la terre. C'est pourquoi, elle prône la résurrection des corps et pas seulement la survie de l'âme. Dans ce domaine aussi, nous sommes conditionnés par le mépris hérité de la matière du néo-platonicisme d'où vient l'idée d'un salut uniquement spirituel et individuel, situé au-delà de l'histoire et du monde.



Dieu ne se repent pas de ses dons..


Comme l'avaient fait avant lui les prophètes, Jésus prône l'idée d'un rassemblement d'Israël à la fin du temps des nations (Luc 21 v 24). Il s'agit bien ici de la même Jérusalem que celle dont, dans le même texte, il annonce la destruction : la Jérusalem terrestre. Où est le déplacement de la perspective eschatologique ? Où sont les prophéties sur la Jérusalem terrestre ? Transférées à la Jérusalem céleste ? On pourrait aussi citer la prophétie de Jésus en Matthieu 24 v 38, où il annonce que le temple (la maison) restera en ruines jusqu'à son retour.

En Actes I v 6-9, Jésus, loin de contredire les disciples qui lui demandent Est-ce en ce temps-là que tu rétabliras le royaume d'Israël ?», confirme implicitement le bienfondé de cette attente des disciples ; seulement, il leur annonce qu'elle ne les concerne pas et qu'un long temps devra s'écouler, temps qu'ils devront mettre à profit pour prêcher l'Evangile à toutes les nations par la puissance du Saint-Esprit.


On le voit, il n'y a pas de transfert de l'espérance eschatologique de la Jérusalem terrestre à la Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament. Le salut qu'il proclame concerne aussi ce monde-ci au moyen de la «consolation d'Israël» et de la «rédemption de Jérusalem» qu'attendaient les justes d'Israël et que Jésus a commencé à accomplir et qu'il mènera à la perfection.


En fait, derrière de telles affirmations, on voit poindre la vieille théologie de la substitution selon laquelle le rôle d'Israël dans l'histoire du salut s'arrête avec Jésus-Christ, jusqu'à ce qu'Israël se «convertisse». Dès lors, sa vocation est transférée à l'Eglise «nouvel Israël selon l'Esprit» (sauf curieusement les prophéties de jugement qu'on continue à appliquer à Israël).


Pourtant, Paul affirme que les dons de Dieu sont sans repentance (Romains 11 v 29). Tout le chapitre I I des Romains est là pour confirmer cette affirmation. Pour Paul, les païens doivent veiller attentivement à ne pas oublier que Dieu n'a pas rejeté son peuple et que si pour l'heure, Israël a subi «une mise à part», un temps viendra où il sera pleinement réintégré dans sa vocation et regreffé sur ses racines (donc aussi dans sa terre!). Alors sa réintégration sera pour le monde entier une bénédiction semblable à une résurrection d'entre les morts. Et si nous vivions les prémices de cette réintégration ?



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