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Bénédictions messianiques

Le « juif » est celui qui loue, c’est l’étymologie de ce mot en hébreu. « Yehoudi » vient de la racine « leodot » qui signifie louer, bénir. En cela, Jésus était un véritable juif.

 

Dans cet article, nous voulons évoquer quelques bénédictions messianiques qu’on trouve dans le Nouveau Testament.

  Dans la tradition juive qui existait déjà à l’époque de Jésus, il y avait une bénédiction pour chaque circonstance de la vie. Il y avait une bénédiction au lever, il y avait une bénédiction au coucher, une bénédiction quand il faisait beau, une bénédiction quand il pleuvait, une bénédiction quand on avait une bonne nouvelle, une bénédiction quand on recevait une mauvaise nouvelle… Chaque circonstance de la vie était l’occasion de louer et de bénir Dieu. Dans l’évangile, nous trouvons une circonstance où une femme s’écrie : « Heureux le sein qui t’a porté, heureuses les mamelles qui t’ont allaité… ».

 

On trouve une bénédiction de ce type dans la « Pessika » du Rabbi Kahana, qui est un commentaire d’Esaïe 60. Cette bénédiction nous dit ceci : « la splendeur du vêtement du Messie sera vue d’un bout à l’autre de la terre, alors Israël dira : « béni soit le sein d’où est venu le Messie, bénie soit la génération qui l’aura vu de ses yeux… lui dont la bouche annoncera le pardon et dont la prière sera douce. »

 

  On remarquera que cette bénédiction commence par une allusion à un autre teste qu’on trouve dans le Nouveau Testament. Quand Jésus parle de sa venue, il déclare : « comme l’éclair part de l’orient et va vers l’occident, ainsi en sera-t-il du Fils de l’homme lors de sa venue. »

 

  On trouve dans la tradition juive d’autres textes qui vont dans le même sens. Ainsi, il nous est dit que le nom du Messie existe avant la fondation du monde, ce qui est une manière de dire que le Messie a une origine éternelle et qu’il sera revêtu d’un vêtement nouveau.

 

  Cette tradition est tirée d’un commentaire du chapitre 63 du livre du prophète Esaïe, où le fils de l’homme qui vient pour exécuter les jugements de Dieu contre le pays d’Edom est revêtu d’un vêtement couleur d’écarlate.

 

  Selon cet antique commentaire, ce vêtement n’est autre que la prophétie. Le Messie en effet sera revêtu de l’esprit de la prophétie, comme d’un vêtement, ce qui a été le fait lorsque la création était aussi un acte prophétique du Seigneur. Il en fut de même lors du don de la Thora, du passage de la mer Rouge, de la première venue du Messie, puis il en sera ainsi lors de la vengeance que le Seigneur exercera sur Edom, c’est-à-dire sur l’empire romain, le quatrième empire de Daniel, au dernier jour.

 

  Nous trouvons également que le Messie vient d’une manière éclatante dans le chapitre 12 du livre du prophète Zacharie : « il vient sur les nuées et même ceux qui l’ont percé le verront ». Ce texte, on le sait, est repris dans le livre de l’Apocalypse au chapitre premier. On trouve cette idée aussi dans Matthieu 26 au verset 61, quand des faux prophètes s’en prennent à Jésus lors de son procès devant le grand prêtre, ce qui conduit ce dernier à poser à Jésus la question décisive : « Es-tu le Messie ? » Les faux témoins, selon ce qui nous est rapporté dans ce texte, annonçaient que Jésus avait dit qu’il allait détruire le temple et le reconstruire en trois jours.

 

  L’idée du Messie qui construit le temple est aussi une idée qu’on trouve dans le judaïsme à partir de Zacharie 13, où il est question de celui qui allait reconstruire le temple. On saura que l’on aura affaire au Messie lorsque ce dernier reconstruira le temple. Jésus ne répond pas directement à cette accusation mais quand on lui pose la question : « es-tu le Messie ? », il répond « tu l’as dit, et vous verrez désormais le Fils de l’homme assis à la droite de la puissance de Dieu et venant sur les nuées du ciel ».

 

  Un des noms du Messie dans la tradition juive est « celui qui vient ». On trouve cette expression dans le psaume 118 : « béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ».

Dans sa prison, Jean-Baptiste demande : « Es-tu Celui qui vient, ou devons-nous en attendre un autre ? »

 

  On trouve cette même idée dans le chapitre 25 de l’évangile de Matthieu où, s’adressant aux justes, Jésus déclare : « Venez, vous qui êtes bénis de mon Père », c’est-à-dire qui entrez dans le cadre de ce qui a été défini dans les béatitudes « Heureux ceux qui… etc. »


Pour revenir au procès de Jésus, lorsque Jésus dit qu’il sera assis à la droite de la puissance, il confirme implicitement qu’il reconstruira le temple et qu’il manifestera cette puissance dans le temple reconstruit. Nous trouvons aussi une allusion à cette éventuelle reconstruction du temple dans le chapitre premier des Actes, lorsque les disciples lui demandent : « Rabbi, est-ce en ce temps-là que tu rétabliras le royaume d’Israël ? » Il est implicite dans cette question que la restauration du royaume d’Israël implique la reconstruction du temple. Et Jésus de répondre : « vous recevrez de la puissance ».

Ainsi la manifestation de la puissance du Saint-Esprit est associée aux choses dernières, au rétablissement du royaume d’Israël et à la reconstruction du temple. Nous trouvons cette idée aussi dans le chapitre 6 du livre du prophète Zacharie au verset 13 où il est question du Messie qui porte le nom de « Tsémah », c’est-à-dire la branche et qui reconstruira le temple.



  Aussi lorsque Jésus répond à la question « Es-tu le Messie ? », qu’il sera assis à la droite de la puissance (Luc 22 : 69) il cite le psaume 110 où Dieu invite le Messie à s’asseoir à sa droite. Il est question aussi d’un texte semblable dans le psaume 80, où il est fait allusion à l’homme de ta droite, le Fils de l’homme.

 

  L’expression puissance, en hébreu « gvoura », vient d’Esaïe 9 : 7 où il est dit que le Messie sera le « Conseiller, l’Admirable, le Dieu puissant, le Père éternel, le Prince de la paix ». Il est pour cela revêtu du Saint-Esprit pour être ce conseiller de Dieu. Le Saint-Esprit lui est donné de cette manière et lors de son départ, Jésus déclare : « Tout pouvoir m’a été donné dans le ciel et sur la terre. »

 

  La tradition ancienne nous dit que tous les prophètes ont prophétisé en fonction des jours du Messie (paroles du Rabbi Yohanan). Mais pour ce qui est des choses du monde à venir, « ce sont des choses que l’œil n’a pas vues, que l’oreille n’a pas entendues, que Dieu a préparé pour ceux qui espèrent en lui. » On aura reconnu là un texte de 1 corinthiens 2 : 9. On retrouve une pensée semblable en 1 Pierre : 1-2, c’est en relation avec la Pessika de Rabbi Kahana que nous avons citée plus haut : « heureuse la génération qui verra ces choses. » On trouve une parole semblable dans la bouche de Jésus après le retour de ses disciples, quand il déclare : « Heureux vos yeux de ce qu’ils voient, heureuses vos oreilles de ce qu’elles entendent, car beaucoup de prophètes et de justes ont voulu voir ce que vous voyez et ne l’ont pas vu, entendre ce que vous entendez et ne l’ont pas entendu. »


  Lorsque la femme bénit Jésus en disant : « Heureux le sein qui t’a porté et les mamelles qui t’ont allaité » Jésus répond « Heureux plutôt ceux qui écoutent la Parole de Dieu et la mettent en pratique ». Cette parole est à mettre en relation avec une autre parole de Jésus « ce ne sont pas ceux qui disent « Seigneur, Seigneur » qui entreront dans le Royaume de Dieu, mais ceux qui font la volonté de mon père qui est dans les cieux », c’est-à-dire ce sont ceux qui mettent pratique ses paroles et non pas ceux qui l’ont seulement reconnu comme Messie. Face à cette parole, nous reconnaissons quelque chose de l’humilité de Jésus qui, lorsque la femme le reconnaît comme Messie, montre que ce qui est important ce sont les paroles qu’il prononce.

 

  Selon le langage biblique, voir de ses yeux implique une responsabilité. On est responsable de ce que l’on a reconnu comme vrai. C’est aussi ce que l’on trouve dans le Psaume 109 où il nous est dit : « Proclamez ses actions ou ses paroles parmi les peuples ». Le Nouveau Testament est aussi jalonné de cantiques. Ainsi les nations sont invitées à louer Dieu avec son peuple, ce qui est un écho de ce que Paul dit au chapitre 11 de l’épître aux Romains quand il rappelle que les nations n’ont pas à être arrogantes vis à vis du peuple d’Israël, parce qu’elles sont des branches sauvages greffées sur l’olivier naturel d’Israël. Certes, au chapitre 13 du livre des Actes, en rejetant l’évangile, les juifs rejettent aussi leur mission vis-à-vis des païens, d’être ceux qui vont proclamer les louanges de Dieu au milieu des peuples. Aussi, les apôtres de Yechoua sont-ils le « reste d’Israël » destinés à être le moyen de salut d’Israël et de toutes les nations.

 


Le Benedictus dépend aussi de la grande prière où l’on prie le Seigneur de susciter à Israël une « corne de salut »


  Nous avons deux cantiques très importants au début de l’évangile de Luc dans ce que l’on appelle l’évangile de l’enfance, que la tradition latine a appelé le Magnificat, le cantique de Marie, et le Benedictus, le cantique de Zacharie. Magnificat : « mon âme magnifie le Seigneur » et le second parce qu’il est dit « « Béni soit l’Eternel, le Dieu d’Israël ». On trouve aussi le cantique des anges que la tradition latine appelle le Gloria : « Gloire à Dieu dans les lieux très hauts et paix sur la terre ».


Le Benedictus dépend aussi de ce que l’on appelle les 18 bénédictions, ou la grande prière où l’on prie le Seigneur de susciter à Israël une « corne de salut », une puissance qui le délivre. On trouve cette même idée dans le cantique de Zacharie qui dit : « il a suscité une corne de salut dans la maison de David son serviteur », c’est-à-dire une puissance de salut. Le Gloria, le cantique des anges, la nuit de noël, dépend d’une vieille prière juive que l’on dit dans le culte de la synagogue et que l’on appelle le « Kedoucha ».

Il est à noter que tous ces cantiques reprennent la pensée des béatitudes, que l’on appelle « l’inversion prophétique », c’est-à-dire qu’au jour du Messie, quand ce dernier viendra pour établir son règne, le sort de chacun sera bouleversé. Les malheureux deviendront heureux et ceux qui sont heureux maintenant deviendront malheureux. Les riches seront appauvris, les pauvres seront enrichis. Les grands seront abaissés, les petits seront élevés. Les premiers seront les derniers et les derniers seront les premiers.




C’est le thème qu’on retrouve dans ces deux cantiques et que l’on retrouve aussi dans les béatitudes, de même que dans l’épître de Jacques. Ainsi, le Messie vient pour consoler les affligés. On trouve aussi cette même idée dans l’évangile de Luc, où Jésus, dans la synagogue de Nazareth, lit Esaïe 61 où il est question de la mission messianique qui a pour fin de consoler les affligés de Sion. C’est pour cette raison que la tradition juive appelle le Messie « Menahem », le consolateur. C’est un nom qui vient du premier chapitre des Lamentations de Jérémie au verset 14, et Esaie 61 : 10 « Le Saint-Esprit est sur moi, car il m’a oint pour consoler les affligés ». Et c’est la raison pour laquelle ces affligés sont invités déjà à se réjouir des choses qui viennent.

 

Il y a un texte fort intéressant en Luc 23 : 29. Lorsque Jésus est emmené au Golgotha portant sa croix, les filles de Jérusalem pleurent sur lui et Jésus se retourne en leur disant : « ne pleurez pas sur moi, mais pleurez sur vous et sur vos enfants, car si l’on fait ces choses au bois vert, qu’arrivera-t-il au bois sec ? »


Cette parole a été comprise comme une annonce du jugement de Jésus sur son peuple. En fait, C’est une prophétie sur la ruine de Jérusalem quelques dizaines d’années plus tard. Son peuple, le peuple d’Israël souffrira avec lui de l’oppression romaine. Ce faisant, Jésus se manifeste comme le prophète messianique. Comme l’avait dit la foule à plusieurs occasions, « un grand prophète a paru parmi nous et Dieu a visité son peuple ». La mort et la résurrection des prophètes est un thème juif très connu à cette époque. Ailleurs, Jésus dira aussi : « il ne convient pas qu’un prophète meure hors de Jérusalem ! ».

Mais la résurrection du prophète est aussi un gage de la résurrection du peuple au dernier jour. Lorsque Jésus assimile son propre sort à celui de Jérusalem qui sera détruite plus tard, implicitement il évoque aussi la résurrection de ce peuple qui sera associé à sa propre résurrection lorsque viendra le temps de rétablir de royaume d’Israël.


C’est cette puissance que Yeshoua a reçue en tant que Messie qui lui permettra d’accomplir ces actes au dernier jour. Il y a une parole qui dit ceci, en commentant proverbe 18 : 4 : « la parole dans la bouche de l’homme est comme de l’eau qui jaillit ». Et le commentaire déclare ceci : « c’est une source de sagesse, un réservoir de puissance et de gloire ». Le mot puissance, « gvoura » nous dit ce commentaire, signifie que la parole conduit à la puissance qui, elle-même conduit à la sagesse. Alors le Saint-Esprit habite au milieu de ceux qui étudient la Thora (Deutéronome 19 : 20) de telle sorte que le Rabbi Meïr pouvait déclarer : « qui étudie la Thora mérite bien des choses, mais le monde entier lui est redevable, car il jouit de puissance et de connaissance » (commentaire du psaume 8 : 14).

Celui qui étudie la Thora a en effet la connaissance des choses cachées, cela lui est révélé par le Saint-Esprit, à partir de ce qui est écrit. Le Saint-Esprit est donc la source de cette connaissance, de cette sagesse et de cette puissance. Et Rabbi Meïr d’ajouter « la shrina, le Saint-Esprit, habite avec ceux qui étudient la Thora ». Comparez avec la parole de Jésus : là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux », car il est aussi écrit que « toute parole sera établie sur la déposition de deux ou trois témoins ». L’expression « au nom de » signifie dans le but de, à cause de, en réponse à, au nom du royaume de, c’est-à-dire à cause de Jésus. Cela peut aussi signifier à la place de, dans le but d’une tradition, d’une transmission qui s’opèrent de génération en génération.

 

On peut comparer cette parole de Jésus « je suis au milieu d’eux » avec celle de Hillel qui disait : « là où Hillel se trouve, Dieu est là car il est partout où son nom est invoqué ». De la même manière qu’il est écrit dans Exode 20 : 2 « partout où je me révélerai à toi, je viendrai à toi ». Jésus croyait que sa personne et son enseignement étaient essentiels et vitaux pour le monde. Aussi, de la même manière que Jonas a été signe dans sa génération, de la même manière Jésus le sera pour toutes les générations, et notamment pour la génération messianique. Esaïe aussi avait annoncé que ses enfants seraient des signes, de même Ezéchiel. Selon un vieux texte également, il nous est dit qu’Hénoc, qui était un type du fils de l’homme, a été un signe pour toutes les générations. Ainsi le Fils de l’homme l’a été dans la sienne et il le sera dans la génération dernière, quand son signe paraîtra d’une extrémité du ciel à l’autre. Alors, tous ceux qui le verront se lamenteront à cause de Lui et ils verront celui qu’ils ont percé.



Article paru en 2008 dans le Keren n°78

2 Comments


md94
Feb 24

Super intéressant, comme toujours !! J'ai tellement hâte que vienne le Royaume !!

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Yehoudi vient de la racine YDH (yod dalet hey) qui vient elle-même de YAD qui désigne la main en hébreu. YDH a comme sens primaire de "tendre ou utiliser la main", Ce n'est que dans un sens figuré que le mot YDH peut être compris comme "louer (Dieu)", "remercier" ou "confesser" (en levant les mains vers Dieu).

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